"Puisse la fraternité être ton guide" [PV : Maïlyse & Ryoofu]

Kuroiyume était assise, silencieuse, en tailleur dans l'herbe. Ryoofu était à coté d'elle, tranquillement installé en silence.
Elle l'avait retrouvé et il était resté silencieux, la bouche close, les yeux vide, l'air ailleurs. Mais Kuroiyume le fixait et tentait parfois d'engager la conversation, alors, il se tournait vers elle, et posait son regard absent sur elle, sans rien dire.
Ensuite de quoi, il regardait de nouveau droit devant lui, et Kuroi, triste de ce silence, se mettait à regarder ailleurs.

Elle avait fini par venir ici, et lui l'avait suivit, silencieux, immobile, l'air perdu, et elle s'était posée ici, à coté de la rivière qui coulait avec un clapotit apaisant.
L'eau douce lui rappellait Maï-chan, sa "petite soeur" et elle commença à composer, dans sa tête, les vers d'un poême de tristesse. Ce n'était pas dans son habitude, mais les mots venaient à sa pensée sans même qu'elle ne les appelle. Alors elle créa une petite tablette de glace dans laquelle elle grava, avec un stylo de vent aceré, les mots qui lui venait en tête :

"La solitude n'est pas une mauvaise chose,
La méchanceté en fait, en est la seule cause,
Et attendre sans silence, et aimer sans romance,
Et pleurer dans l'attente d'un soleil plus brillant,
Et souffrir, sans mourir, c'est bien plus alarmant.
Petite soeur que mes mots peuvent te paraître acides,
Puisse la fraternité être ton seul guide,
Petite soeur au sourire qui me ferait grandir,
Alors que tes pleurs pourraient me faire mourir,
Petite soeur que mes mots peuvent te paraître acides,
Moi dont la colère, est l'unique guide."

La tablette de glace lui vola des mains, et Ryoofu la lut, rapidement en silence, avant de la lui rendre.
Il ne fit aucun commentaire, toujours stoïque.
Kuroiyume reprit la tablette, et lui adressa un regard méchant :
"Ne m'arrache pas mes affaires des mains."
Il ne répondit pas.

Elle lui tourna le dos, boudant comme une gamine, et regarda l'horizon, des larmes dans les yeux. Elle se mit à pleurer lentement, être gardienne, elle le savait, lui donnerai tôt ou tard du travail.
Mais par dessus tout, ces derniers temps, Maïlyse lui manquait.

Kuroiyume avait parlé.
Ah.
Le regard bleu du gardien de vent se posa sur un nuage, et il pensa à nouveau à ce qu'il aurait du faire, il regrettait, il n'aurait jamais du sortir du collier. Kuroi, sa Kuroi, était en danger désormais.
Il devait penser à autre chose.

Ce nuage... avait la forme d'une paire d'ailes, des ailes d'anges.
Le vent avait poussé le nuage violemment, faisant de l'ange un démon.
Et Ryoofu avait gardé son visage intact, même si son coeur venait de faire un bond. Elle ecrivait.

Depuis quelques heures, il la suivait partout, immobile, ne répondant pas lorsqu'elle parlait.
Pourtant, il avait une foule de choses à lui dire, mais... aucuns mots ne voulait franchir la barrière de sa gorge serrée.
Il l'avait retrouvée, un collier autour du cou.
Un élan de jalousie avait fait bruler le vent de ses pensées, un élan de colère contre ce collier avait encore raviver ce feu, et un élan de tristesse à l'idée que Kuroiyume le remplace avait achevé de l'éteindre.
Il s'était tout simplement sentit mourir.
Il n'avait pas ouvert la bouche.
Elle lui avait presque sauté dans les bras, et avait parue blessée qu'il ne réagisse pas.

Mais, il ne pouvait tout simplement pas.
Si son coeur lui voulait hurler tout ce qu'il pensait à Kuroiyume, son corps, lui, refusait la moindre expression sur son visage pâle.
Il aurait voulu glisser sa main dans la sienne, la serrer contre lui pour la consoler.
Le seul mouvement qu'il avait pu faire, et ce n'était pas vraiment lui qui l'avait fait, c'était prendre cette tablette et la lire, puis la lui rendre.
Elle lui avait lancé un regard méchant, derrière lequel elle avait caché tout la tristesse qu'elle éprouvait.

Il avait reçu comme une giffle, elle s'était retournée.
"Et attendre sans silence, et aimer sans romance."
Aimer sans romance.
Il tentait encore une fois de laisser sa voix dépasser sa gorge serrée.
Quelqu'un arriva, blonde, Maïlyse d'ailleurs, et serra à sa place Kuroiyume dans ses bras.
Sa main se crispa.
Il fixa de nouveau le nuage, et, là-haut, une bourrasque détruisit le visage du démon pour en faire l'expression d'une douleur sans précédent.
La présence de Maïlyse lui faisait beaucoup du bien à lui aussi, sans qu'il ne comprit pourquoi, cette fille exerçait sur lui un pouvoir de calme étrange...
Ses yeux se fermirent doucement.
Quelque chose de chaud parcouru sa joue.
Une larme?
Il ne bougea pas, son visage toujours impassible, alors que cette larme coulait, seule et solitaire, sur sa joue glacée de manieur de vent désolé.

Maïlyse la serra contre elle et elle se laissa aller à sa tristesse murmurant doucement :
"Je suis fatiguée Nee-chan..."

La tablette roula de ses doigts crispés au sol, le texte contre le sol.
"Je fais de plus en plus souvent semblant d'être quelqu'un que je ne veux pas être... Je ne sais plus pourquoi je suis là, je ne sais plus qui a besoin de moi, je suis perdue, perdue... Nee-chan, aide-moi, je n'en peux plus..."

Elle devint petit à petit une toute petite fille, d'un peu moins de huit ans sans doute.
Ses longs cheveux noirs étaient toujours là, elle était juste devenue la petite Kuroiyume qu'elle était autrefois.
mais son regard dur n'était plus qu'un tissu de coton humide de larmes, et elle se serra, en pleurs, contre sa soeur de coeur.
Sa voix d'enfant résonna encore :

"Pourquoi je n'ai pas de prince charmant moi hein?..."

Elle se laissa aller en larmes contre sa soeur, et sa douleur se matérialisa, pendant que sa robe rouge devenait bleue.
bleue de glace, mais une glace chaude, qui recouvrait lentement tout son petit corps d'enfant.
Malgré l'étrange chaleur de l'élement, elle frissona, et se serra encore contre sa soeur, des larmes ruisselantes sur son visage d'enfant.

"Tu m'as manquée..."